MARIE-AUBE LANIEL
Démarche artistique

Historienne et artiste multidisciplinaire en arts visuels, mon travail se veut une célébration du temps et de la profondeur, dans un monde où la modernité impose une vitesse de vie délétère. Je conteste la superficialité moderne et l’hypertrophie du consumérisme, qui, depuis la Révolution industrielle, ont engendré une aliénation des individus par rapport aux ressources naturelles et induisent une pression de performance constante. Archiviste du temps qui passe, j'ancre mes œuvres dans un contexte historique; je tente de tisser le passé pour éclairer l’avenir, de sculpter l’invisible afin d’ouvrir des espaces de dialogue, de mémoire.
Ma pratique s'articule autour d'une exploration minutieuse de l'utilisation de divers végétaux indigènes renouvelables et récoltés de façon éthique, ce qui nécessite une compréhension intime des cycles de renouvellement naturels. Mon travail comprend une importante dimension de recherches botaniques pour la découverte de nouvelles fibres sculpturales et de nouveaux supports biodégradables. J’y ajoute 22 variétés de saule provenant de la culture de mon oseraie, choisies avec soin pour leurs propriétés distinctives. En recourant uniquement à des matériaux biodégradables, j'invite à une reconsidération des rapports que nous entretenons à la matière et aux traces que nous laisserons derrière nous. En reliant les matériaux naturels par l’action humaine, ce sont tous les éléments du monde qui sont interconnectés et dépendent les uns des autres.
J’explore les effets du temps sur les matériaux. En incorporant des végétaux vivants aux œuvres ou en laissant mes œuvres se dégrader naturellement en extérieur, mes créations deviennent des entités dynamiques, participant à un dialogue continu avec leur environnement et soulignant le caractère transformateur de l'art.
Je m’inscris dans un héritage culturel de transmission de connaissances. Ma pratique est intrinsèquement centrée sur le lien avec l’autre, que ce soit lors de création devant public ou de discussions individuelles. Tout en retirant beaucoup de ces échanges, il est primordial pour moi de participer à nourrir l’intelligence collective.
Descendante d’une lignée féministe, mon travail vise à valoriser les savoirs traditionnellement féminins (cueillette, vannerie, broderie, tissage) à travers une réinterprétation contemporaine, afin de redonner voix à celles qui, par leur ingéniosité et leur dévouement, ont soutenu les conditions de vie de leurs familles à travers les âges. M'inspirant des réflexions d'Arthur Lochman sur « l’éthique du faire », ma pratique met en exergue la solidité des métiers artisanaux en tant que réponse à l’instabilité contemporaine. En favorisant une reconnexion entre l’humain et l’acte de création, je soutiens l’idée que s’identifier à ce que l’on crée — plutôt qu’à ce que l’on consomme — est non seulement un acte d’affirmation personnelle, mais également un acte de résistance. En encourageant le ralentissement et la réflexion, mon travail vise à établir un lien entre ces compétences ancestrales et les enjeux contemporains, démontrant que les savoirs traditionnels peuvent offrir des solutions aux défis écologiques modernes.